Il n’y a de biographie que de la vie improductive, écrivait justement Barthes. Présenter sa vie professionnelle ramène toutefois à la production. La mienne se concentre sur l’écriture philosophique, les pratiques sonores et l’échange culturel.

Écrire

Le premier livre que j’ai écrit concernait la relation entre concepts et métaphores dans les œuvres philosophiques de Sartre. Depuis, j’ai continué à lire les textes abstraits en portant l’attention sur leurs images, leurs sonorités et leurs affects. Je me suis intéressé aux imaginaires généalogiques dans le domaine du savoir (Pour en finir avec la généalogie, 2004) auxquels j’ai opposé des modèles alternatifs (Les Airs de famille, une philosophie des affinités, 2012).

Une pratique musicale depuis l’enfance m’a orienté vers la dimension sonore de la pensée et j’ai mené une enquête sur la relation féconde de certains penseurs à leur instrument (Le Toucher des philosophes. Sartre, Nietzsche et Barthes au piano, 2008). Cela m’a conduit à suggérer plus généralement d’écouter autrement les œuvres de l’esprit (Penser avec les oreilles, 2019). Cette écoute a partie liée avec une démarche psychanalytique qui interroge le lien entre la vie affective et les discours intellectuels.

Intrigué par les écarts entre les thèses des philosophes, de Rousseau à Foucault, et la manière de mener leur existence, j’ai écrit Le Génie du mensonge, 2015, en cherchant à comprendre plutôt qu’à dénoncer. Constatant aujourd’hui que la frontière entre le vrai et le faux s’est dramatiquement estompée dans le discours politique, j’ai essayé de tracer une archéologie de cet effacement durant les cinquante dernières années dans Peut-on encore sauver la vérité?, 2024.

Il va sans dire que ces réflexions viennent de ma fréquentation d’auteurs tels que Sartre, Beckett, Glissant ou Mishima auxquels j’ai consacré des études parfois structurales, parfois intimistes. L’expérience m’a appris que plus on se cache derrière des auteurs et des thèses, plus on se fuit. Aussi ai-je tenté d’écrire sur mon propre héritage, dans la mesure où il implique aussi l’Histoire, celle des émigrés et celle des fous (Hors de moi, 2006, et Les Enfants de Cadillac, 2021).

Écouter

De 2002 à 2013, j’ai été producteur d’émissions philosophiques à la radio France-Culture pour environ 650 épisodes.

Philosophie en situations (au sein du programme des Vendredis de la philosophie) consistait en débats sur des questions philosophiques, accompagnés de chroniques de philosophes.

Macadam Philo proposait à un.e philosophe de commenter l’actualité de la semaine.

Je l’entends comme je l’aime invitait un penseur, artiste ou écrivain à dialoguer et créer avec un compositeur. L’émission avait l’ambition de montrer l’importance de la musique dans l’œuvre de l’invité.e, et de l’associer à une pratique musicale.

Le journal de la philosophie visait à présenter quotidiennement une parution philosophique en invitant son auteur.

Transmettre

Une double formation en littérature (master et agrégation de Lettres Modernes) et en philosophie (master et doctorat à l’université de la Sorbonne) m’a conduit à enseigner, d’abord dans des lycées (titulaire à La Châtre, Orléans et Paris) puis dans des universités (titulaire à Poitiers, Paris-Est, Paris 8, puis New York University depuis 2019, et comme visiting professor dans plusieurs universités américaines, suisse et japonaise). J’ai présidé le Collège international de philosophie, une institution de cinquante chercheurs internationaux, de 2001 à 2004.

À NYU désormais, je donne des cours de philosophie européenne et je dirige La Maison Française où je programme des colloques, des expositions et des concerts.